La France dans le chaos

Dr Maxime MAURY, Officier des Palmes académiques, Président de VIGIE Éco et Ancien directeur régional de la Banque de France. 

« La plus coûteuse des folies est de croire passionnément à ce qui est manifestement faux. » 

( Henri Mencken) 

 

Deux hypothèses principales se détachent pour le 7 juillet :

  • La France restera ingouvernable avec une majorité relative, cette fois du Rassemblement National ; l’élection présidentielle pourrait suivre en cas de refus par ce parti de gouverner ; mais l’article 16 de notre Constitution permet également au président de gouverner seul pour de courtes périodes de 3 à 6 mois ( cf adoption du budget).
  • Ou bien le parti populiste, héritier de Jean-Marie Le Pen, l’emportera nettement, mais une cohabitation avec Macron sera alors difficile. Là encore, une élection présidentielle anticipée pourrait en découler.

 

Ces perspectives ont déjà entraîné une augmentation significative de nos spreads de taux d’intérêt à dix ans avec une double conséquence :

 

  • L’alourdissement des charges financières sur notre dette qui atteindront les 60 milliards cette année ; nous empruntons désormais plus cher que le Portugal et nous nous rapprochons des conditions de l’Espagne.
  • La poursuite de la baisse des prix de l’immobilier qui va durer si les taux remontent.

 

Si le monde continue à faire crédit à la France, ce sera donc de plus en plus cher.

 

L’Europe écarquille les yeux devant la folie du « débat » politique français dominé par les extrêmes et par le déni des lois économiques comme par le rejet de notre appartenance à l’Union européenne.

 

 

I ) UN CLIMAT DE HAINE ET DE MENSONGE :

 

La France des médias et des réseaux sociaux se gargarise de mots et de lubies dans une élection de la haine où le seul enjeu électoral sera de savoir quel sera finalement le moins haï des trois blocs électoraux en lice :

 

  • Macron est haï mais son bilan reste contrasté : à l’actif, des progrès très nets sur l’emploi et l’attractivité, une fiscalité allégée, mais au passif l’augmentation de l’endettement la plus forte de la zone euro depuis 2019. Et des inégalités croissantes. Mais c’est en réalité pour son incapacité psychologique à parler aux Français et à investir la dimension symbolique de sa fonction qu’il fait l’objet d’un rejet. Par exemple, on ne comprend pas que le président de la République se soit engagé dans la campagne des européennes. Ce n’était pas son rôle ! C’est le président de la transgression permanente.

 

  • Héritier du Front National, le populiste RN est haï par celles et ceux qui, à gauche, y voit le suppôt du « fascisme » mais cette haine est symétrique. Il est également déconsidéré, avant même d’avoir gouverné, par celles et ceux qui ont compris que son programme économique était le même que celui de Mitterrand en 1981 ( et qui avait conduit la France à trois dévaluations du franc ). Celui qui est pressenti pour Matignon n’a aucune formation, aucun métier, aucune expérience hors la politique. C’est le triomphe du tout-médiatique qui est une victoire du néant. 

 

  • Enfin la gauche s’est reconstituée autour d’un parti aux relents anti-sémites dirigé par le plus ancien des politiciens français, pseudonyme : le «général Santerre», trotskiste lambertiste non élu par ses militants, emporté et autoritaire. Parler de « Front populaire » dans ces conditions est un abus de langage. Renaissante avec les élections européennes, la gauche de gouvernement s’y est à nouveau compromise dans une union dont certains membres appellent au meurtre de la police et brandissent des drapeaux étrangers à l’Assemblée Nationale.

 

Un des enjeux cachés de cette élection sera l’éventuelle allégeance au Kremlin des nouveaux dirigeants français, ce qui nous ramène loin dans le passé. 

 

L’impact européen sera également très fort via l’éventuel refus par un gouvernement populiste de financer le budget de l’U.E.

 

Le chaos français pourrait déboucher sur une crise de l’euro. Et sur un plan européen de tutelle financière de la France .

 

II) LES VRAIS ENJEUX POUR LA FRANCE NE SONT JAMAIS DÉBATTUS :

 

Dans le chaos médiatique régi par l’audimat, tout se passe comme si la politique était une réthorique coupée des réalités économiques.

 

Rappelons rapidement les principaux enjeux qui devraient faire l’objet d’un débat de fond complètement absent de la campagne :

 

  • La soutenabilité de la dette : 

Le renouvellement de la dette à des taux de plus en plus élevés nous entraîne vers des charges financières exponentielles et vers de nouvelles dégradations de notre note. Et à terme vers le défaut avec une tutelle européenne comme jadis sur la Grèce. Peut-on encore l’éviter ?

 

  • L’insuffisance de l’activité :

Plus d’une entreprise sur deux ne trouve pas de main-d’œuvre dans un pays où la population active baisse et dans lequel les taux d’activité des jeunes et des séniors sont plus faibles qu’ailleurs.

Comment faire face au vieillissement ?

 

  • Le déficit persistant sur les retraites :

Les retraites sont dans le rouge et leur déficit atteindra 15 milliards en 2030.

Il ne s’agit pas de désindexer les retraites mais de travailler plus pour les financer.

Comment fera-t-on pour porter la retraite à 67 ans ( hors les métiers pénibles) alors que les Français ne semblent pas informés ?

 

  • La nécessité d’une immigration choisie :

Une immigration choisie avec des quotas sur les métiers en tension négociés par pays contre le retour des délinquants irréguliers. C’est d’autant plus indispensable que notre population active baisse.

Comment clarifier le débat et trouver les bonnes solutions ?

 

  • La clarification de l’organisation territoriale :

Il faut sortir du millefeuilles administratif et privilégier la région. Le RN est contre et avec quelques nuances le président de la République l’est aussi !

Comment décentraliser ?

 

  • La nécessité de la délégation et de la décentralisation :

Montesquieu écrivait : « Le pouvoir rend fou et le pouvoir absolu rend absolument fou.»

Nous y sommes ! 

Dans un pays qui est le plus centralisé d’Europe et qui paraît irréformable faute d’une formation des dirigeants au management.

Comment changer la culture de nos dirigeants ?

 

Le 7 juillet il faudra voter.

Comme l’écrivait Raymond Aron, « le choix n’est pas entre le bien et le mal mais entre le préférable et le détestable » sachant qu’il n’y a plus aucun débat de fond en France.

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