La même vie, mais dans un autre monde…

 

Cette nouvelle donne vampirise et change tout !

L’anticipation nous permettra-t-elle de devenir des acteurs différents après ce séisme subi par toutes les couches sociales, professionnelles, politiques ? Parce qu’il est évident à présent que nous sommes tous à la même enseigne, les grands, les petits, les faibles, les jeunes et les plus âgés, les riches et les pauvres, le virus ne fait aucune distinction, plus de couleur, pas de frontières, il est partout alors que l’humain est isolé, confiné, face à lui-même, faible et presqu’impuissant.

Pourtant, à n’en pas douter, comme tous les autres, ce virus sera vaincu par l’Homme, parce que l’Homme a cultivé une intelligence qui lui permet de gagner ce genre de batailles, mais pas sans sacrifices. Si de cette crise, on est en droit d’espérer un monde meilleur, qui est en mesure de prédire une date approximative ? Dans quel contexte ? Sous quelles conditions ?

Cela force aussi chacun d’entre nous à s’interroger sur ce à quoi il est prêt à renoncer : en moins d’une semaine, nous avons abdiqué la plupart de nos libertés, sans broncher. À terme, il faudra voir.

C’est peut-être un tournant pour la mondialisation elle-même. Depuis près d’une vingtaine d’années, la mondialisation a été la norme – ni remise en question ni contestée par aucun des pays les plus puissants du monde. Autrement dit, elle était censée être notre avenir. Tous s’enrichissaient grâce à une connectivité toujours plus efficace et des marchés en expansion. S’il était possible d’agir sur les prix en faisant fabriquer des iPhones en Chine ou décortiquer des langoustes écossaises en Thaïlande, pourquoi s’en priver ? Et cela fonctionnait pour des millions de gens. La misère diminuait, l’espérance de vie montait en flèche. En achetant à bas prix, nous partagions nos richesses. Qui aurait pu s’en plaindre ? Mais la mondialisation est également source de bouleversements. L’automatisation, la stagnation et le déclin des industries traditionnelles ont quelque peu gâché l’ambiance, alors que de nombreux participants à la fête étaient de plus en plus mécontents du sort que leur réservait le système. À tort ou à raison, beaucoup rendent aujourd’hui la mondialisation responsable de leurs maux. Le coronavirus vient tout juste de saccager un peu plus les réjouissances, en nous rappelant les risques que nous courons à jouer sans établir et se baser sur certaines règles.

Quelle que soit désormais la trajectoire du virus, nous savons qu’il torpille toute croissance économique attendue pour l’année. Ce ne sont pas uniquement des chiffres sur un bilan. On parle là en milliards, de richesses et de ressources, littéralement balayées du prévisionnel. La perspective d’un avenir sans frontières prônée par la quasi-totalité des pays est remise en cause, tant par les citoyens que par les réalités de l’évolution démographique. Aujourd’hui les frontières et les barrières sont de retour pour endiguer le coronavirus.

Ce virus est un redoutable agent de la démondialisation. Il a interrompu les déplacements des populations locales et des touristes, empêché les salariés de se rendre à leur travail, coupé net la chaîne logistique entre les pays. Quand l’épidémie de SRAS a éclaté en 2002, la Chine ne représentait que 4 % de l’économie mondiale. Aujourd’hui, ce chiffre est de 16 %. L’économie planétaire s’est développée. L’idée de la mondialisation reposait sur le principe de la liberté (presque totale) de mouvement des biens et des personnes d’un endroit à un autre.

Des années durant, les optimistes du commerce mondial ont attendu que les choses reviennent « à la normale » après le krach de 2008. Ce krach n’a pas seulement sapé la confiance dans les bourses et les marchés immobiliers, il a également remis en question notre foi dans la mondialisation. Depuis 2012, le commerce mondial a subi un net ralentissement, ce qui en fait la plus longue période de stagnation commerciale après celle de la Seconde Guerre mondiale. On a voulu considérer comme acquis les fabuleux progrès réalisés grâce à l’interconnexion de la planète, mais l’actualité braque la lumière de ses projecteurs sur les faiblesses de la mondialisation. L’expansion du commerce international a entraîné une rupture entre les salariés et des patrons anonymes avec lesquels ils n’ont plus de liens. Les inquiétudes à propos de l’environnement entrent en conflit avec le volume des émissions de dioxyde de carbone nécessaires au transport de nos marchandises et au nôtre autour du globe. Le Covid-19 vient nous rappeler que ce modèle peut être anéanti en quelques jours.

Nous ne savons pas encore dans quelle mesure les pertes dues au coronavirus seront comparables à celles causées par la grippe saisonnière habituelle (1 % alors que le corona virus atteint les 3,4 %), mais il semble probable qu’elles auront un impact durable, ce qui en fera un tournant dans l’histoire de l’hypermondialisation.

Un virus ne suffira pas à inverser la mondialisation du jour au lendemain. Mais celui-ci a peut-être accéléré un changement déjà entamé dans les structures économiques qui ont donné le ton des vingt dernières années. Ce qu’il adviendra ensuite sera formulé par un monde fasciné par l’interconnectivité, mais qui se méfie des fragilités qui en sont indissociables. Continuerons-nous à adopter les comportements qui sont à l’origine de notre richesse actuelle ? C’est de cela que dépendra la prospérité de notre nouveau monde.

En attendant des jours meilleurs et sans nous fonder sur d’hypothétiques perspectives, je vous propose de nous poser de vraies questions. Cet épisode de vie nous incitera-t-il à être les auteurs d’un nouvel état d’esprit et à repenser nos modes de gestion, ou serons-nous les spectateurs d’un modèle imposé ?

 

Par Anne-Marie JOBIN,
Directrice Générale
Journaliste – ECONOMIE GABON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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