Quel accompagnement vers l’entrepreneuriat pour la jeunesse africaine ?

 

Sur une population de plus de 1,3 milliard d’individus en 2020, la proportion des jeunes (15 – 24 ans) sur le continent africain excède 60%. Et selon les données de diverses institutions internationales (ONU, UNESCO, BAD, Commission de l’Union Africaine…) ce sont actuellement  en moyenne 15 millions de jeunes qui, chaque année, se présentent sur le marché du travail. Cela, dans un contexte où la croissance enregistrée par l’Afrique, au cours des deux dernières décennies, n’a pas, selon la Commission de l’UA, créé suffisamment d’emplois de qualité, ni entraîné de véritables gains de bien-être.

Une tendance incline à l’optimisme, cependant, quant à la capacité de la jeunesse africaine à participer plus activement au développement du continent : la population africaine est déjà la plus entreprenante au monde. En effet, 22% des Africains en âge de travailler créent de nouvelles entreprises contre 19% en Amérique Latine et 13% en Asie. Dans le même temps, cette tendance pose en substance la question de l’accompagnement de la jeunesse africaine.

De l’intérêt « d’oser entreprendre… ensemble » !

Dans le contexte général de forte restriction des opportunités d’emplois salariés sur le continent africain, l’entreprenariat se présente comme l’opportunité -la plus crédible et prometteuse-  pour les jeunes africains d’intégrer le marché du travail. C’est également la meilleure voie pour que l’extrême jeunesse de la population du continent se transforme en véritable dividende démographique.

Cet état de fait conduit à appréhender l’entrepreneuriat et la problématique de l’accompagnement à déployer pour y intéresser la jeunesse africaine au travers de quatre préoccupations, au demeurant liées :

  • (i)- la capitalisation du dividende démographique qu’est censée constituer pour l’Afrique, la jeunesse de sa population ;
  • (ii)- l’employabilité des jeunes du continent sous l’angle de la réalisation de leur potentiel créatif et l’accroissement de leur contribution au développement du continent ;
  • (iii)- les stratégies à adopter et les politiques à déployer pour faire des jeunes des acteurs du changement dans leurs environnements et
  • (iv)- la contribution du secteur privé lui-même à la propagation de l’esprit d’entrepreneur dans les populations jeunes. 

Cette grille d’appréciation tient de ce que l’action de créer une activité économique ne s’apprend pas à l’école. En atteste des études qui montrent qu’à la sortie de l’Université, seulement 0,6% d’étudiants aspirent à mener un projet entrepreneurial tandis que plus de 90% sont prédestinés à devenir salariés.

Il faudrait donc faire de l’esprit d’entreprendre un objectif éducatif et une pratique pédagogique dans les pays africains, une pratique assise sur la créativité, le sens des responsabilités, l’autonomie, le leadership, l’esprit d’équipe, la confiance en soi, la résilience, la création et la gestion de valeurs économiques…

Pourquoi choisir l’entrepreneuriat ?

En tant qu’exercice qui permet de créer de la valeur (richesse, emplois, valeurs économiques et financières) et avoir plus d’impact social et économique dans le développement de son milieu, l’entrepreneuriat ouvre des horizons par la réalisation du génie créatif qu’il permet et la participation utile à l’édification de la société, qu’il favorise.

Il s’agit d’un choix de vie qui demande, quand on l’a fait, d’être persévérant, résilient, courageux, patient, préoccupé de l’autre… Cela revient à s’aligner sur une course d’obstacles qui requiert engagement et efforts de tous les instants.

Sur cette piste, tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais ! Mais faut-il encore savoir faire le choix de son activité et le format de son opérationnalisation : reproduire un modèle économique qu’on connaît ou s’inscrire dans une logique de rupture en proposant un produit ou un service nouveau pour répondre aux besoins du marché ?

En tout état de cause, quel que soit le cheminement retenu, les recettes pour réussir demeurent quasiment les mêmes : disposer de réelles capacités techniques en relation avec son activité, développer ses capabilités de base, bénéficier des appuis des détenteurs de capitaux, engagement permanent, sens des responsabilités, bon sens et pragmatisme, prééminence des investissements et dépenses de production sur les investissements et dépenses de pur confort.

Nul ne pouvant faire un métier sans l’avoir exercé ou pratiquer une activité sans en connaître les articulations, le degré d’employabilité -entendu comme disposition de compétences de base transférables intégrant les aptitudes à travailler en équipe, résoudre des problèmes, utiliser les TICS, l’expérience acquise (école de la vie)…- est un atout décisif pour être performant.

Comment améliorer les conditions d’employabilité de la jeunesse africaine ?

 L’employabilité des jeunes est pour les pays africains un défi du fait du déséquilibre structurel entre la demande d’emploi et l’offre. La structure du système productif du continent étant l’une des causes de cette déconnexion entre l’offre et la demande, la transformation structurelle des économies africaines est une des clés pour améliorer l’employabilité des jeunes sur continent. Il est projeté que cette mutation de système productif induise la création de 25 millions d’emplois à l’horizon 2025.

Trois secteurs d’activité majeurs : l’agriculture, l’Industrie et les Tics ont été identifiés comme à fort potentiel de ces emplois par la Banque africaine de Développement (BAD) qui appuie les pays du continent via divers programmes pour y renforcer et accroitre notablement les compétences (techniques, professionnelles) des jeunes et des adultes dans une optique d’obtention d’un travail décent voire d’entreprendre.

L’UNESCO en fait de même, via des appuis multiformes, ciblant l’amélioration de l’enseignement et de la formation technique et professionnelle (EFTP) ;  l’équipement des jeunes en compétences nécessaires à l’emploi, à l’obtention d’un travail décent, à l’entrepreneuriat, à l’apprentissage et, la réduction du chômage des jeunes en leur offrant un accès à la formation et à des compétences de qualité pour le monde du travail et l’auto-entrepreneuriat.

L’implication du secteur privé plutôt diffuse gagnerait à être plus active et concrète dans toutes les initiatives en relation avec la création de l’emploi au profit de la jeunesse du continent. Notamment dans la conception et l’élaboration des curricula aux fins de leur alignement avec les besoins objectifs des entreprises, dans la familiarisation des jeunes avec le monde du travail, dans l’accompagnement des jeunes entrepreneurs via des programmes de coaching, mentoring, Business Angels, de coopération et collaboration interentreprises….

Comment créer ensemble et avec qui ?

Seul on va vite, mais ensemble on va plus loin ! Ainsi, si entreprendre commence par une idée qu’on a tout seul, matérialiser son projet requiert des formes de collaboration diverses et variées, et des ressources qu’il convient de savoir capitaliser. En cela l’entrepreneuriat demeure fondamentalement une œuvre de création commune voire collective.

S’y engager, est synonyme de choix d’interactions avec les autres pour créer -mais aussi partager- de la valeur. D’où l’importance de savoir s’entourer et savoir jouer des différents leviers de ressources à disposition.

Faire le choix de l’entrepreneuriat se résume à faire l’option, à une échelle micro, du « progrès pour tous et le bonheur pour chacun ». Car le vrai entrepreneuriat est assis sur un sens de l’autre.

Louis AMEDE

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