Le résultat des élections américaines : un « Game changer » pour la défense européenne ? Sur la forme certainement sur le fond c’est beaucoup moins évident.

 

 

 

 

Il ne fait aucun doute que le résultat des élections américaines aura un impact sur les relations qu’entretiennent les États-Unis avec l’Union Européenne en général, y compris en matière de défense. Cependant sur ce point, avant toute conclusion hâtive, en particulier dans la perspective d’une victoire du candidat démocrate, il convient de rester prudent. En effet, l’avènement d’un nouveau maître à la maison blanche et d’une nouvelle administration ne devraient pas changer profondément la donne si ce n’est sur la forme.

En ce qui concerne la défense de l’Europe, dès son élection en 2016 le président Trump a clairement affiché la couleur : les États Unis ne sauraient plus longtemps porter la plus grosse part du fardeau, les européens doivent investir plus pour leur défense.

Ce message ne pouvait surprendre ces derniers puisqu’il avait été martelé sans discontinuer par tous les responsables américains depuis la création de l’Alliance Atlantique en 1949. En revanche, les Alliés, en particulier ceux voisins de la Russie ont été très marqués par le discours agressif de Donald Trump et les menaces explicites qu’il comportait quant à la non-application systématique par les États-Unis du fameux article 5 garantissant la défense collective de l’Alliance si les Européens n’acceptaient pas le « new deal de défense » : dépensez plus et achetez américain. Aucun président américain n’avait, par le passé, explicitement franchi ce pas, celui de la contractualisation « commerciale » du rôle des États-Unis au sein de l’OTAN. Cela dit, au résultat 4 ans plus tard, certes la confiance mutuelle au sein de l’Alliance s’est assez largement érodée, l’attitude la Turquie aidant, mais sur le fond rien n’a vraiment changé, les forces américaines sont toujours présentes sur le front oriental de l’Alliance et les européens sont toujours intimement dépendants des États-Unis pour leur défense collective. On peut cependant à juste titre avancer le constat que l’attitude du président Trump associée à une perception plus aigüe des menaces contemporaines a poussé les Européens à s’intéresser collectivement à leur défense et à prendre des initiatives intéressantes mais dont les résultats concrets peinent encore se manifester.

Qu’en adviendra-t-il si Joe Biden devient le « Commander In Chief » US ? De par ses fonctions passées, celui-ci connaît bien l’Europe et les européens et l’on peut s’attendre à une offensive de charme de sa part visant à rassurer ses amis et alliés européens en renouvelant la volonté de son pays à se tenir aux côtés de ses Alliés en toutes circonstances. Nul doute toutefois que le souci d’équilibre de la charge de défense sera toujours présent, même exprimé de façon beaucoup plus diplomatique. Cela d’autant plus que pour la future administration, quelle qu’en soit la couleur politique, la menace principale, existentielle, continuera à venir de la Chine. Il faut à ce titre se souvenir du fameux « pivot vers l’Asie » annoncé en son temps par le président Obama, sans d’ailleurs qu’il ne se manifeste de manière aussi spectaculaire que certains l’avaient prédit.

En fait la vraie question pour les Européens qui se cache derrière les résultats de l’élection américaine est bien de savoir quel sera leur poids dans la future politique étrangère des États-Unis et de manière générale dans les grands enjeux mondiaux. A ce titre, un changement de président Américain pourrait donner un nouvel élan constructif aux relations Américano-européennes en particulier dans le domaine diplomatique, voire économique. Mais ne nous leurrons pas, l’équation de l’avenir de l’Europe, de sa puissance, de son autonomie stratégique, des moyens de sa défense restera dans les mains des Européens, quoiqu’il advienne outre-Atlantique le 3 novembre, Ceux-ci auraient tort d’imaginer que des relations apaisées avec le grand frère Américain résoudront les questions de fond qui se posent à eux, en particulier pour leur défense face aux multiples formes de menaces auxquelles ils sont confrontés. Seule une Europe forte, confiante en elle-même et déterminée pourra constituer un partenaire crédible, fiable et respecté que ce soit pour le locataire actuel de la maison Blanche ou son successeur, si successeur il y a…… !

Jean-Paul PALOMEROS

 

 

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