La défense : une raison d’être de l’État

 

En 1989, la chute du mur de Berlin promettait, selon certains, la fin de l’Histoire et l’avènement de la démocratie libérale comme modèle universel, sans entraves. Force est de constater que le sens de l’Histoire a déconstruit cette théorie. Non seulement les menaces sont toujours présentes, mais elles se sont multipliées et diversifiées. Nos grands-parents ont vu le jour dans une Europe meurtrie par la Seconde Guerre mondiale, tandis que nos parents ont grandi avec la menace d’une guerre nucléaire entre l’Est et l’Ouest. Notre génération, venue au monde après la Guerre froide, est née avec les images des attentats du 11 septembre 2001, dont nous commémorons cette année le triste 20ème anniversaire. Trente ans après l’effondrement de l’URSS, nous vivons aujourd’hui dans un monde multipolaire où les menaces sont imprévisibles car peu identifiables. Les risques terroristes, climatiques, et désormais sanitaires, font partie de notre quotidien. La défense est donc, au sens premier du terme, plus indispensable que jamais à notre sécurité collective.

 

Pourtant, si les menaces se sont multipliées et ont largement mutées, la société française semble beaucoup moins soucieuse face à ces enjeux qu’elle ne l’était au XXème siècle. Dans un monde de communication instantanée, les images des conflits armés et des attentats de masse sont certes, relayées, mais « désacralisées ». Et pourtant, les attentats terroristes sur notre sol ont fait plus de 300 victimes depuis 2012, ce qui fait de la France le pays occidental le plus touché. De surcroît, depuis 1991, 379 militaires français sont morts en opérations extérieures, à des milliers de kilomètres de chez eux ; au Liban, en Afghanistan, en Côte d’Ivoire ou plus récemment au Sahel, afin de protéger nos concitoyens. Aujourd’hui, les menaces sont lointaines, diffuses et multiformes, et par conséquent, plus difficiles à cerner et à anticiper. En réalité les faits apprécient et reconnaissent les missions menées par les armées. Un récent sondage mené en juin 2021 par Opinion Way et le CEPS montre que 86% des Français ont une assez bonne ou une très bonne image de leur armée. La population française aime son armée et la jeunesse l’aime également. L’idée selon laquelle les jeunes seraient moins sensible à la valeur de la défense en France est absolument fausse.

En réalité les faits apprécient et reconnaissent les missions menées par les armées.

 

 

 

La défense, c’est l’une des premières raisons d’être de l’État.

 

Le Général de Gaulle affirmait que la défense était “la première raison d’être de l’État”. Aujourd’hui, sans prise en compte de la dette publique, la défense est la deuxième dépense de l’État avec près de 40 milliards d’euros, juste après l’éducation. L’indépendance nationale n’est donc pas un terme qui est désuet, elle reste une réalité stratégique fondamentale et une priorité des gouvernements successifs. Il est essentiel de rappeler que la France, avec 120 396 km 2 de territoires d’Outre-mer, est présente sur tous les continents et doit défendre ses intérêts. Si cette menace est désormais connue et traitée, nous ne sommes définitivement pas à la hauteur sur les enjeux contemporains, notamment en matière de cybersécurité. Malgré les efforts significatifs déployés, cet enjeu doit être la priorité. Sensibiliser les citoyens à la défense et notamment au risque cyber permet de mieux anticiper les enjeux et les menaces de manière collective. Par ailleurs, cela est d’autant plus essentiel que notre génération est née avec internet et se doit de maitriser les enjeux de cybersécurité. La défense ne peut plus aujourd’hui être dissociée du cyber. Selon l’ANSSI, les cyberattaques ont été multipliées par 4 en France en 2020, visant des secteurs stratégiques comme les hôpitaux, les multinationales et très récemment les responsables politiques, comme l’ont montré les révélations de l’affaire Pegasus. Par conséquent, une réflexion de la jeunesse sur nos priorités stratégiques et sur la définition du rôle des armées s’impose naturellement.

 

Se défendre, voire faire la guerre  

 

L’action militaire constitue l’un des éléments principaux de la construction de la notion de hard power. Cette composante, sans doute la plus manifeste, est par ailleurs celle qui a prédominé historiquement. Elle s’impose ainsi comme cruciale dans la stratégie de puissance des États. Admettre cette dimension et sa nécessité c’est reconnaître la présence et le développement de menaces diffuses qui nécessitent de protéger les autres, d’attaquer, de riposter, en particulier lorsque l’ennemi nous désigne explicitement. Aussi, il convient de repenser cette action et particulièrement le rôle des militaires dans l’expression de ce hard power : dans quelles mesures ses derniers doivent être répartis sur le terrain d’opération ? Faut-il limiter les prises de risque inhérentes à leur mission, dont l’opinion publique n’accepte plus les pertes sur des champs de combats estimés trop éloignés. Des Etats affaiblis, parfois faillis, constitue des zones géographiques propices à la naissance de menaces exogènes pour la France. Dès lors, il est fondamental d’y répondre par l’édification de l’« armée de nos besoin » par opposition à celle de nos habitudes, pour reprendre la formule célèbre du général de Gaulle. Cette armée doit être préparée à cette évolution géopolitique et technologique des conflits, à la fragmentation des menaces, et aux attentes des citoyens, afin de maintenir son rang de puissance et ainsi protéger les Français et les Européens.

 

Oser le rayonnement de la défense !

 

Jeunes étudiants, nous constatons que le soft power passe avant tout par la puissance économique et industrielle. Afin de maintenir notre soft power à la hauteur de nos ambitions, une défense rayonnante sur le plan économique s’impose. Le camouflet infligé à la France et à NAVAL Group, témoigne de l’importance primordiale de notre industrie de défense dans la stratégie globale de rayonnement française. La preuve vient d’être faite que nos alliés peuvent aussi devenir des menaces pour nos intérêts les plus vitaux. La France rayonnera lorsqu’elle cessera d’être naïve ! C’est aussi à notre génération de prendre conscience de ces enjeux pour les relever avec courage.

La défense c’est aussi promouvoir ce que l’on est, une société responsable qui incarne une histoire et des valeurs. Le soft power passe avant tout par l’image. La question qui en découle naturellement est la suivante : quelle image pour les militaires dans le cinéma et les séries ? Les Américains et les Britanniques ont l’habitude de promouvoir leurs victoires militaires historiques à travers Hollywood et les plateformes de streaming. Des films comme Il faut sauver le soldat Ryan, American Sniper ou Dunkerque sont vus par des centaines de millions de personnes à travers le monde et participent au prestige militaire anglo-saxon, et donc à l’influence des États-Unis et du Royaume-Uni dans l’inconscient collectif et notamment chez les jeunes, qui grandissent avec ces supports culturels. En France, nous sommes pour le moment trop frileux quand il s’agit de célébrer nos héros.

Dans la mission des militaires pour le rayonnement de la France, n’oublions pas les aspects culturels comme soutien (critique) permanent. La culture doit servir de relais à la célébration de nos militaires car elle participe de l’importance du soft power français, et de l’identification de nos atouts.

 

Tom RICCIARDI, Délégué – Délégation à la jeunesse du CEPS

Alexis DUMAS, Délégué adjoint – Délégation à la jeunesse du CEPS

Denise HAMDANI, Présidente – EPIC – Déléguée adjointe – Délégation à la jeunesse du CEPS

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